Portrait de Portrait de Fayçal Karoui - OPPB - Resoo - Faycal Karoui

Fayçal Karoui ou la musique dans (la) Pau

L’homme est difficile à retenir, ne serait-ce qu’une heure, d’autant plus lorsque c’est pour parler de lui ! Mais, comme toute personne passionnée, une fois «harponné», Fayçal Karoui est intarissable sur ses actions, ses rencontres et ses projets. Depuis 16 ans, le quadragénaire originaire du Val-de-Marne est le directeur musical et chef de l’Orchestre de Pau Pays de Béarn (OPPB). Il en est le fondateur, l’âme et son animateur zélé. C’est l’orchestre français qui passe le plus de commandes à des compositeurs contemporains français. La patte Karoui, c’est aussi des concerts dans les discothèques, à la campagne, chez les voisins, en prison et dans les quartiers.
«C’est ici que je me réalise complètement. En plus, la ville a une taille qui rend les choses plus faciles.» Le chef d’orchestre, au frère-jumeau chirurgien, est régulièrement invité dans les plus grands orchestres d’Europe et du monde : Paris, Nantes, Strasbourg, Milan, Rome, Lausanne, Monte-Carlo, Vienne, Tokyo, New-York… Mais son coeur et ses plus forts désirs d’action sont accrochés au pied des Pyrénées. «La ville de Pau est ma maison», s’épanche avec sincérité ce spécialiste de musique nouvelle.
Sa passion pour le piano puis pour la direction d’orchestre sont nées «au fur et à mesure». Pas de vocation à faire valoir ni de dynastie familiale à mettre en exergue. Les parents Karoui – son père est tunisien, sa mère française d’origine alsacienne – , étaient médecins de campagne au sud de Paris. Il y a bien toujours eu un piano sur lequel jouaient Fayçal et sa sœur Sophie. «Puis, ça s’est fait naturellement, au gré des rencontres», se souvient le chevalier des arts et des lettres : conservatoire régional puis conservatoire national de Paris, assistant de Michel Plasson à l’orchestre national de Toulouse pour le répertoire symphonique et lyrique. Des prix et des bourses. Et, en 2002, il est invité à Pau, 79 000 habitants, ville sans orchestre ni salle de répétition, juste une secrétaire à mi-temps. Depuis, les concerts jouent à guichets fermés. Les abonnements plafonnent et la musique classique a irrigué la ville même là où on ne l’attend pas.

Le moteur de Fayçal Karoui ? La curiosité de l’autre. Sa méthode ? Faire naître des projets d’une rencontre improbable, d’un échange, d’une conversation dans un bar, une MJC ou chez un paysan du coin. Ses moyens ? La musique bien sûr et les musiciens de l’orchestre qui jouent le jeu de cette ouverture au monde quasi iconoclaste dans le milieu de la musique classique ou contemporaine. Ses soutiens ? La mairie en premier lieu est sans faille. Puis en fonction des projets et des époques, des associations jouent le jeu, près de 100 entreprises locales réunies par le Club Concert’O, fondé et présidé par Christian Roussille aussi, ou encore les fondations Total et Orange.
L’orchestre de jeunes Palois des cités, baptisé El Camino, est né comme cela. Des jeunes de 8 à 12 ans pour qui les mots conservatoire, clé de sol et solfège ne parlaient pas plus que le château de Pau ou le Pic du midi d’Ossau, ont commencé à jouer d’un instrument, à l’oreille. Les musiciens leur ont fabriqué des méthodes pour mémoriser les partitions et les enfants jouent par mimétisme. Les familles, défavorisées, loin de toute culture musicale, sont venues à des concerts, et regardent leurs gosses avec admiration.
C’est LA grande fierté du chef d’orchestre : «Cela montre que la musique permet de construire des passerelles, des liens et des rencontres, qu’elle fait de l’aménagement du territoire, tout simplement qu’elle participe à la vie de la cité.»
Pour la saison 2016-2017, ils sont 220 gamins, accrochés au plaisir de jouer et de découvrir un autre univers, si loin mais si puissant en sensations et en reconnaissance sociale. Début janvier 2017, au concert du Nouvel an, au zénith de Pau, 12 000 personnes – «plus que Johnny Hallyday… en trois dates !» – sont venues les écouter jouer et chanter 10 minutes avant chaque concert. «Cette initiative montre aussi que l’on peut rester – ou pas – dans des schémas de reproduction sociale car les situations ne sont pas écrites dès le départ de la vie.»

Faycal Karoui
Orchestre de Pau & Pays de Béarn
L’Usine des Tramways
Avenue Gaston Lacoste
Pont Lalanne
64000 PAU
Tél : 05 59 80 21 30

L’ORCHESTRE
EL CAMINO